Maxime Gillio / Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres

Quelques infos sur le livre :

Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres

  • Auteur : Maxime Gillio
  • Serie :
  • Genres : Témoignage
  • Editeur : Pygmalion
  • Collection : Documents et témoignages
  • Publication: 22/ 03/ 2017
  • Edition: Broché
  • Pages : 185
  • Prix : 18,90€
  • Rating:  

Résumé :

“Je vois Gabrielle, ma fille, m’observer de son regard indéchiffrable. Pourquoi ce livre ? Après tout, c’est notre passé, sa vie, mes sentiments. Il ne concerne qu’elle et moi, pourquoi l’exposer aux yeux de tous ? Parce que nous en avons besoin. Parce que nous devons guérir de cet amour contrarié et nous retrouver. Je n’écris pas un livre sur l’autisme, encore moins un guide ou un mode d’emploi, j’offre les souvenirs que je nous ai volés. L’histoire banale d’un père et d’une fille”. Chaque jour, les chiffres concernant l’autisme nous alertent. 650 000 cas en France… Si chacun est différent, la souffrance de l’enfermement est, pour eux comme pour leurs proches, commune. Une souffrance que Maxime Gillio tente de contourner avec la force de ses mots, sincères et émouvants.

 

 

Avis de TeaCup :

Je tiens à remercier les éditions Pygmalion pour l’envoi de ce SP.

J’ai vu passé ce roman un peu par hasard et bouche à oreilles. La couverture attire l’œil, le résumé fait le reste. Je me disais qu’avoir un parent au micro, un genre de témoignage plus que de docu serait bien, serait différent. Et j’avais raison, d’autant plus avec Maxime Gillio aux commandes, j’ai eu un coup de cœur pour ce roman. Pas intersidéral, mais un coup de cœur qui se détache du reste de mes lectures assurément.

Je n’avais jamais rien lu de lui, mais je le suppose assez caustique dans ses romans. Il y a un cynisme qui m’a toute de suite parlé et des phrases cash qui font mouche. Je préviens, car ça peut rebuter une personne qui a du mal avec ce ton, même si on comprend vite qu’il faut donner le change quand on souffre et que c’est sa manière de le faire pour l’auteur. J’ai pensé à ce sketch de Guy Bedos sur « peut-on rire de tout ? » la question se pose quand on parle d’un sujet aussi sensible que le handicap et surtout l’autisme, sorte de tabou mal compris. L’auteur parle de RAY MAN et j’ai trouvé ça si vrai, le truc que tout le monde sort quand on dit « autisme » et qui ne semble pas si proche de ce que des connaissances qui l’ont vécu me font ressortir. Avec des gamins pas forcément géniaux et machines à compter, juste atypique avec un fonctionnement qu’on ne cerne pas bien au final de l’extérieur à part de grands lieux communs, du genre « ils évitent le regard ». Que sait-on de plus ? Tous les autistes ont-ils les mêmes « trucs » ?

Ce livre apporte des réponses à toutes ses questions. Des réponses pour une enfant qu’on voit grandir. Le regard du père et tendre et sans concession. On s’émeut, on a envie de rire ou on a la gorge qui se serre sur quelques passages plus « hard ». Comme je le dis plus haut avec toute la tendresse d’un père Maxime Gillio évoque une situation impudique puisqu’il nous livre de ce quotidien, de leur intimité. Mais il tente de le faire avec une distance, un humour, l’une des phrases m’a semblé bien donné le ton. Il s’adresse à sa fille et lui dit avoir écrit ce roman à la place de voir un psy (en gros), et qu’avec l’argent économisé il ira avec elle au MacDo où elle prendra un MacFlury sans cacahuètes parce qu’elle est allergique à l’arachide. Concluant « Oui, tu es autiste ET allergique. Tu ne serais pas un peu chiante, des fois ? »

Cette phrase résume un peu tout le livre. Il y a de l’amour, de l’humour, des moments de grincement sourds, quand il est question du long arsenal à mettre en place pour accompagner son enfant dans un système fait pour l’enfant « normal » ou « moyen », celui qui ne dépasse pas, ne déborde pas. On y croise tout un tas de termes dans lesquels on parvient malgré tout à se repérer (CLIS, SESSAD…)

Plus que ça on suit l’évolution de Gabrielle jusqu’à ses seize ans, avec des hauts, des bas, les choix de ses parents retranscrit sans fausse pudeur. Certains peuvent d’ailleurs interroger le lecteur, c’était le plus frappant : à de nombreux moments l’auteur parle de ce qu’ils font pour accompagner Gabrielle, l’idée de ne pas la lâcher, de parfois l’accompagner jusqu’au bout. Je ne sais plus s’il l’utilise, mais presque l’idée du « malgré elle ». Et c’est là où ça peut titiller le lecteur. Est-ce trop ? Est-ce obligé et nécessaire ? Une chose ressort de ma lecture, si on se pose la question on n’a pas de réponse. Impossible de le dire de l’extérieur, au final.

Il me reste de ce roman un ton que j’ai trouvé juste et sans complaisance à part peut être l’entête du : « jamais sans ma fille autiste ». Le rappel d’un roman bien connu m’a gêné ça faisait un peu facile et toomuch par rapport au reste.

Ce roman est écrit avec amour, avec détresse ne passant pas sur la maladresse d’un père, d’un parent tout court. Il montre toute la complexité de devenir parent et dépeint si bien tout ce qui ne sera jamais et dont il faut faire le deuil dans cette parentalité. C’est ce que j’en ai compris en tout cas. Les câlins, les échanges simples, le truc de se dire que le plus banal des sentiments devient d’un coup difficile à décrypter… tout ça laisse place à une relation qui n’a rien à voir. Hors cadre, très complexe et parfois sûrement déchirante. Il n’y a pas de complaisance dans le sens « ma fille est parfaite ainsi ce petit bijou aucun regret, etc.» Si l’auteur a des regrets et il l’avoue, car il s’inquiète sur l’avenir de sa fille et c’est ce qui devient le plus poignant et parlera à tout parent, ça, c’est universel et d’autant plus puissant chez un enfant différent. Il ne gomme rien de la complexité, la réalité brute et dure du handicap dans notre société. En ça, je trouve ça fort, honnête. Il aime sa fille, telle qu’elle est. Mais a conscience de tout ce qu’elle affronte avec son profil et tout ce qu’il aimerait pour elle. Pas un père parfait, mais un père qui aime et se débat, assurément.  À lire pour comprendre un peu mieux, même un tout petit peu.

 

Extrait :

« Maxime, je connais un bon pédiatre. Si j’étais vous, j’irais le voir avec Gabrielle. Ce n’est certainement rien, mais par sécurité… »

Gabrielle avait deux ans, et ce conseil, prononcé avec bienveillance par un ami formé à l’autisme, allait changer notre existence.

Trois ans plus tard, dans un monde parfait, un docteur en blouse blanche nous aurait annoncé, la voix grave et le regard empli de mansuétude : « Monsieur, madame, je suis au regret de vous apprendre que votre fille Gabrielle est autiste. » Une information nette, ne laissant aucun doute sur son handicap. En réalité, ça ne s’est pas passé comme ça. Nous n’avons pas eu de rendez-vous solennel pour nous informer, les yeux dans les yeux, que notre vie parentale ne serait jamais celle que nous avions espérée. Nous n’étions pas préparés, personne ne nous avait avertis quand Gabrielle est née. Et pour cause, personne ne le savait. Sur son carnet de santé, à l’examen du vingt-quatrième mois, notre médecin de famille a écrit : « Enfant très éveillée, excellent comportement neurologique. »

Plutôt qu’une annonce directe, le diagnostic a été posé par petites touches, à coups de tests de Q.I., de séances psy, de comptes rendus neurologiques jargonneux… Ce fut long et fastidieux. Gabrielle venait d’avoir cinq ans quand le verdict est tombé.

Notre fille était donc autiste. Un mot mystérieux pour des parents qui, comme nous, n’avaient comme seule vision de l’autisme que Dustin Hoffman dans Rain Man. Il comptait le nombre de cure-dents dans une boîte en se balançant d’avant en arrière. Ça n’avait rien à voir avec notre fille. Elle se moquait bien des cure-dents. En revanche, elle connaissait par cœur tous les départements français et leurs chefs-lieux.

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A propos de TeaCup

TeaCup pourrait être mon vrai nom tant je suis accro au thé. Je suis une dévoreuse de livres compulsive, je lis de tout et en grande quantité (plus ou moins quoi !). J’ai pensé à me soigner, mais finalement j'ai atterri sur un blog de chroniques. Je soigne le mal par le mal en somme.

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